Italo Calvino, Les villes invisibles

Un classique à lire absolument !

L’ambassadeur Marco Polo décrit à l’empereur Kublai Kan, reclus dans son palais, les villes qu’il traverse lors de ses voyages.
L’auteur utilise la structure du dialogue entre les deux protagonistes pour exposer sous forme de poèmes sa vision de villes fantastiques. Ces fragments poétiques sont classés selon des thèmes récurrents tout au long du livre « les villes et le désir », « les villes et le nom », « la villes et la mémoire »…
Les villes oniriques que l’auteur nous fait découvrir font étrangement échos à l’expérience que chacun peut faire des villes contemporaines aujourd’hui.

Dans ce livre, rien n’est ce qu’il n’y paraît au début, une image en cache toujours une autre. Le prince tente de comprendre de quoi sont faites les villes de son royaume. Mais Marco lui expose sans cesse des éléments mouvants dont on ne sait pas quand ils naissent, quand ils meurent, s’ils sont singuliers ou semblables aux autres, s’ils sont réels ou rêvés. Ce sont des villes qui acquièrent un visage différent selon le point de vue adopté. Plongé dans ce monde fantastique le lecteur est donc confronté à la difficulté de définir ce qu’est la ville.

Un savoureux sentiment naît de la lecture de ce livre, on s’y replongerait volontier au hasard des pages pour y redécouvrir ces fragments d’expérience du voyageur dans ces villes fantastiques.

Le nouveau numéro du magasine Urbanisme présente ce mois-ci un article sur le livre Les villes Invisibles d’Italo Calvino.
C’est une bonne occasion de lire ce classique et de le faire entrer en résonance avec l’aménagement urbain contemporain.

 » Que représentent la ville pour nous, aujourd’hui ? Je pense avoir écrit une sorte de dernier poème d’amour aux villes, au moment où il devient de plus en plus difficile de les vivre comme des villes. Nous nous approchons peut être d’un moment de crise de la vie urbaine, et Les villes invisibles sont un rêve qui naît au coeur des villes invivables. » Italo Calvino


Défense de projets de master 2011 – Architecture – EPFL

 

La volée 2011 des diplômants d’architecture de l’EPFL subira ses critiques finales de projets de master du jeudi 2 juin au vendredi 17 juin. Vous trouverez l’horaire des jurys, le nom des étudiants et les titres des projets sur ce pdf. Si vous avez des questions relatives aux candidats ou professeurs, n’hésitez pas à me les poser, il se peut que je les connaisse.

 


Densités : mesurer la ville

La densité est un thème qui fait débat et auquel nous sommes quotidiennement confrontés.  D’autant plus que le terme de « densité »‘est un de ces mots-valise dans lequel chacun met sa vision des choses.

Le petit document ci-joint présente la notion de densité de manière très pédagogique, en passant en revue tant des aspects historiques que sociologiques. Un document utile pour avoir quelques références et quelques exemples de représentations différentes de la densité.


Urbagram – cartographie de systèmes urbains complexes

Anil Bawa-Cavia, un jeune doctorant  en « systèmes urbains spatialisés » du Center for Advanced Spatial Analysis (CASA) de l’University College de Londres vient de lancer son site internet regroupant des concepts, des applications de modèles informatiques, des explorations et des essais relatifs aux « systèmes urbains complexes ».

Considérant les villes comme des « systèmes urbains complexes », Anil Bawa Cavia est passionné par les modèles permettant  à la fois de cerner la dimension bâtie de la ville (par l’identification de l’infrastructure et l’architecture, en constante évolution, qui définissent sa morphologie) mais aussi son vécu (par l’analyse de réseaux de flux humains et d’interactions sociales)

Il explore les « phénomènes spatiaux fondamentaux » des systèmes vivants, à des échelles variées. La mobilité, la morphologie, la densité, l’intégration et l’énergie fondent la base de ses analyses. Il s’intéresse aux programmes permettant d’explorer les relations entre ces phénomènes intimement liés.

Les projets (essentiellement analytiques) qu’il présente sont généralement d’une grande qualité graphique: simples, clairs et esthétiques. Je vous invite donc à aller vous perdre sur ce site qui s’enrichit de jours en jours.

Pour vous donner envie, voici une étude réalisée par Jon Reades de CASA et le MIT Senseable City Lab, ayant pour objectif de redessiner les limites régionales du Royaume Uni en se basant sur des données téléphoniques. Par l’analyse de plus de 6 milliards d’appels, l’équipe a identifié des « communautés » dont la délimitation spatiale correspond parfois aux limites politiques, mais qui révèlent souvent de nouvelles limites régionales.


Aspirations résidentielles (retour d'une conférence d'Yves Chalas et quelques considérations personnelles)

Lors d’une récente conférence à la Fondation Braillard, Yves Chalas a présenté le résultat d’une de ses recherches qui visait à cerner pourquoi les gens quittaient leur logement au centre ville pour s’installer dans le périurbain, en général dans un pavillon de banlieue (en Suisse on dirait dans une villa  à la campagne…).

5 motifs principaux ressortent de ses enquêtes :

  • La nécessité d’avoir un endroit pour garer sa voiture. Nous sommes de plus en plus mobiles en raison d’un éclatement géographique de nos activités. Cette mobilité est d’ailleurs valorisée. Elle est le reflet de notre multiappartenance à des réseaux sociaux choisis.
  • La nécessité d’avoir plus de places de rangement (des placards !). Nos activités de loisirs et sportives (ski, tennis, plongée, vélo, appareils multimédias, …) nécessitent beaucoup d’équipements. Il faut de la place pour les ranger. Son enquête mettait en avant que dans un appartement standard en ville, l’espace de rangement occupait 4% de la place. Alors que dans un logement individuel (villa), le rangement occupe 40% de la place !
  • « L’envie de nature », qui se traduit par un désir de terrasse ou de jardin. Un désir qui s’inscrit dans une valorisation généralisée de la relation corporelle, hédoniste et sensorielle au monde.
  • La prise en compte d’aspects environnementaux : faire son compost, mettre des panneaux solaires, isoler son logement. Des actions (un engagement) difficile à mettre en pratique dans un appartement en copropriété au centre ville.
  • L’évolutivité, la capacité à transformer son habitation. Cela recouvre autant la notion de plaisir à transformer, à bricoler  son chez soi (en France, 50% des permis de construire portent sur l’évolution de son habitat) que le fait de pouvoir adapter son logement à l’évolution du parcours familial.

Les aspirations en Suisse ne doivent pas être fondamentalement différentes de celles en France. Sachant cela, on peut s’interroger sur la portée des politiques cantonales qui visent à concentrer l’urbanisation dans les centres. Lorsqu’on décrète que la majorité des surfaces bâties pour accueillir la croissance démographique devra être concentrée dans les centres urbains, cela occulte le fait que les m2 en ville et dans le périurbain ne sont pas comparables. On ne peut pas réduire les aspirations résidentielles à une équation mathématique et considérer tous les m2 comme équivalents en qualité. Derrière ces m2, se cachent des projets de vie. C’est une réalité.

On peut bien entendu chercher à orienter la demande (c.f. l’urbanisme d’après crise de A. Bourdin), mais pour cela il faudra offrir des logements et des environnements qui présentent des qualités au moins équivalentes à celles qui sont recherchées. Enjeu d’autant plus difficile à l’heure d’une crise qui nécessite de produire massivement des logements. Et qui place notre action au coeur d’un défi majeur  : concilier qualité de vie et qualité de ville, faire converger politique du logement et politique de l’habitat (habiter ce n’est pas seulement se loger. Habiter tient compte des dimensions sociales, économiques, environnementales, … que l’on attache à son « chez soi »).

Un beau programme qui nous attend et qui exige plus que jamais que l’on s’interroge sur nos pratiques professionnelles !


Vivre dans le périurbain

« Un journal hebdomadaire de la capitale a consacré un article qui se référait explicitement au monde périurbain de ce pays en relevant sa « mocheté » (Télérema n° 3135). Nous avons compris, bien sûr, que l’usage de l’adjectif « moche » renvoyait, pour ce journal humaniste, à une provocation destinée à remuer les consciences assoupies, trop habituées à vivre au milieu de ces enseignes publicitaires, bâtiments commerciaux informes, couleurs criardes, ronds-points, hypermarchés, etc. Mais nous avons aussi été troublés par ce jugement de classe qui faisait de notre zone périurbaine un monde évaluable à la seule mesure esthétique de leur monde à eux. Qui sont-ils ces journalistes centralisés pour décréter la laideur de notre périurbanité ?Qui sont-ils pour porter ce jugement qui, en suggérant de raser notre cadre de vie pour reconstruire je ne sais quel Eden, le rend indigne d’être étudié comme une tribu amozonienne ou une secte dangereuse ? »

Cet extrait est tiré d’un  petit livre (un tout petit livre qui se lit en moins d’une heure) écrit par le journaliste Eric Chauvier. En réaction à un article paru dans Télérama, il a consigné ses impressions de sa vie périurbaine au travers de quelques mots-clefs décrivant les évènements de son quartier. Sur un ton littéraire et philosophique, il nous propose un  point de vue de l’intérieur, de ces quartiers que l’on se plaît à décrier.